La logique du clic: quand la popularité peut rapporter gros

Crédit photo: Libération
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Petite révolution dans le monde de la presse en ligne : à l’image du USA Today, un quotidien américain, de plus en plus de médias en ligne proposent de rémunérer en partie les journalistes en fonction de la popularité de leurs articles sur le web. Si l’idée fait bondir, elle permet aussi de mettre avant un autre point : la nécessité pour les journalistes de s’intéresser de près à leur chiffre d’audience.

Usa Today, un quotidien généraliste américain, n’est qu’un exemple parmi d’autres des nombreux sites américains qui paient déjà leurs contributeurs en fonction du nombre d’internautes ayant lus leurs articles. La logique du clic semble s’être imposée sur la toile et devenir de plus en plus la norme. C’est ce que remarquait David Carr du New York Times, en donnant notamment pour exemple TheStreet.com (un site d’actualité boursière), qui propose 50 dollars pour 60 000 pages vues par semaine. Libération note quant à lui que même le site du magazine Forbes pratique la chose depuis quatre ans. Forbes possède une quarantaine de journalistes salariés et 1 200 contributeurs réguliers, parmi lesquels 400 sont rétribués au nombre de lecteurs. Pour les salariés, les primes sont liées à plusieurs critères : « le nombre de fidèles qu’ils attirent sur le site Forbes.com ou sur Twitter, et le fait de répondre aux commentaires des lecteurs. Nous mesurons ainsi tout ce qu’ils font pour fidéliser leur lectorat.» explique la rédaction du magazine.

http://www.atlantico.fr/decryptage/quotidien-usa-today-primes-journalistes-bonus-clics-pages-vues-75719.html

Autre exemple avec le site d’information Suite101, concept canadien arrivé en France en 2009. Ce site fonctionne selon une formule inédite chez nous : les auteurs perçoivent un pourcentage sur les revenus, proportionnel au nombre de publicités activées sur la page de leur article. Mais avec ce média participatif, gare à ne pas tomber dans « l’info-mercial », régit uniquement par une logique marchande où seul compte la course à l’audience. C’est donc une véritable révolution qui bouleverse le métier et créer un vrai malaise dans la profession. L’idée est que seul ce qui plait aux internautes, seul ce qui marche compte, quitte à se désintéresser des sujets de fond et d’analyse qui produisent souvent peu de clics. En résumé, comme l’écrit Hugues Serraf, journaliste à Slate, il s’agira de ” Ne plus parler que de ce qui fait le buzz en truffant ses papiers de « Paris Hilton nue », « sexe torride sur la plage », « Tom Cruise scientologue » à propos de tout et de rien pour faire frémir Google ». En somme cette course au buzz, au clic, serait préjudiciable à la qualité des articles. Des sites d’informations français inspirés de leurs homologues anglo-saxons, tels Slate ou le Huffigton Post, des « fermes de contenus et des usines à clics », semblent déjà dans cette optique.

http://www.journaliste-entrepreneur.com/2010/09/suite101-des-articles-remuneres-selon-leur-performance-publicitaire/ 

La rémunération à la popularité n’est pas vraiment une nouveauté. Elle existe déjà dans les médias traditionnels : les journalistes « stars » des radios et télé sont rémunérés en fonction de leur popularité. Il en est de même pour la presse écrite avec de grandes signatures et éditorialistes qui négocient eux-aussi leur salaire. Du côté des rédacteurs en chef, ceux -ci doivent depuis toujours jouer avec les audiences ou ventes de leur média, autre thermomètre permettant de prendre la température de ce qui plait au lectorat ou à l’auditoire.

(photo: OndraSoukup via Flickr)

Mais cette rémunération au clic pourrait aussi apporter un changement salutaire au sein des rédactions web. Cela permettrait de faire prendre conscience aux journalistes qu’ils doivent s’intéresser à leur lectorat, connaitre leurs habitudes non pas pour modifier en profondeur leurs choix de sujets mais pour améliorer le site et répondre aux attentes des lecteurs. La mise en avant des articles (titre accrocheur, photos qui attirent l’œil, facilité à trouver l’article,…) s’en trouverait elle aussi changée. Reste à savoir si cela pourrait s’avérer salutaire.

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