Avec Vibe Radio, Lagardère veut s’imposer au Sénégal

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Le groupe LARI tente de s’imposer depuis 2014 en Afrique de l’Ouest. Image CC Rebecca Wilson.

 

Canal+, TV5, Euronews, RFI… Tous sont ici, l’œil braqué sur le taux de croissance du Sénégal. Et le groupe Lagardère veut en être. Après 20 ans passés en Afrique du Sud, la firme créée en 1992 entend couvrir un maximum de territoire par les ondes, avec comme point d’ancrage depuis 2014 deux radios au Sénégal et en Côte d’Ivoire. Avec Vibe Radio, la stratégie signée Lagardère Active Radio International (LARI) s’inscrit dans les mutations économiques et sociales de ces pays en plein essor, et tente de composer avec une certaine réalité.

Les médias hexagonaux l’ont compris : le recul de la francophonie africaine n’est qu’un trompe-l’œil. L’Afrique de l’Ouest pourrait compter 700 millions de locuteurs français d’ici à 2050 selon certaines projections, contre 220 millions actuellement. Au Sénégal, les grands noms français qui prospèrent depuis plusieurs décennies, comme Orange ou Total, voient s’installer leurs équivalents médiatiques. Des groupes puissants, qui comptent se tailler la part du lion et répondre au besoin grandissant de services. Conscient du potentiel d’un pays au développement galopant mais inégal, Lagardère veut entrer sur le marché.

Un marché concurrentiel, mais ouvert

Le paysage radiophonique sénégalais est inégal, comme le montre l’Africascope 2015. Derrière Zik Fm, RFM et Nostalgie, les radios publiques, privées, ou communautaires se partagent les miettes, et doivent se réinventer pour draguer l’audimat. Pour se faire une place au soleil, la française Vibe Radio table sur un environnement à la marge de manœuvre élargie, un marché concurrentiel, mais ouvert.

Dès le premier bouton poussé, en septembre 2014, cette nouvelle antenne musicale installée à Dakar a affiché des ambitions de divertissement teinté de développement numérique. Elle veut s’ouvrir au plus grand nombre, avec des programmes adaptés aux profils et aux tranches horaires. Avec l’expertise acquise par LARI, mais un budget parfois serré, l’équipe internationale de journalistes et d’animateurs qui la porte veut toucher le plus grand nombre, trouver son public et le fidéliser.

Quel public ? Les auditeurs les plus aisés, les jeunes lettrés branchés, les expatriés nostalgiques de culture musicale européenne et anglo-saxonne. Quitte peut-être à creuser le fossé avec une part de la population sénégalaise, et s’enfermer dans une image difficile à remodeler. De fait, cette nouvelle génération de médias français est parfois vue d’un mauvais œil.

Loin des réalités ?

Souvent estampillées « toubab », c’est-à-dire « trop blanches » ou « trop élitistes », ces formules au management décentralisé doivent s’adapter aux mutations d’une société qui fait mentir les projections. Quand il ne veut pas de mbalakh, l’auditeur sénégalais veut du talk en wolof, la première langue du pays, et rechigne à écouter des émissions dans la langue de Molière.

En attendant l’avènement d’une nouvelle classe moyenne consommatrice, les ondes d’Afrique de l’Ouest hésitent donc entre deux tendances. Vibe Radio passe elle-même du français au wolof d’un flash à l’autre : en attendant que la jeunesse connectée passe à la vie active et impose clairement ses goûts, cette nouvelle radio fera office de laboratoire ouvert à toutes les oreilles.

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.