En stage : « à Bobo, c’est pas facile »

Il est 8h30. La conférence de rédaction débute. Les journalistes se réunissent autour d’une grande table, assez fatiguée. Il manque des chaises, et celles qui restent sont pour la plupart cassées. Un peu à l’écart, un vieux fauteuil lui aussi abîmé. Il est réservé à Sally, une journaliste dioulaphone. Quant à moi, je partage ma chaise avec Mireille, une journaliste ouagalaise tout juste embauchée à la RTB2 de Bobo Dioulasso. Au total, nous sommes une vingtaine de journalistes, tous confrontés aux mêmes difficultés techniques.

Nous sommes dans les locaux de la Radiodiffusion Télévision Burkinabé, la RTB 2 Hauts Bassins. Il s’agit d’une antenne locale de la RTB de Ouagadougou. L’installation de cette télévision de proximité publique à Bobo Dioulasso est assez récente. Elle date de 2010 et pourtant les locaux semblent déjà vétustes.

Dans un coin de la salle de rédaction, un ordinateur. Le seul. Il est connecté à internet quelques heures par jour. Alors, tout le monde en profite. L’un lance des téléchargements de documentaires, l’autre regarde les résultats du PMU.  Les onglets s’accumulent, l’ordinateur peine à suivre. Les virus l’ont assailli. Un journaliste arrive pour saisir le lancement de son reportage pour le journal du soir. Le traitement de texte ne s’ouvre même pas.

Souvent, la chef de station télévision, Rokya Sanou Ouidjia, doit couper la connexion pour pouvoir envoyer des éléments du journal à Ouaga par FileZilla. Reste alors un ordinateur hors connexion relié à une imprimante pour la plupart du temps sans papier.

Nos papiers, on les écrit sur des feuilles de couleur, à la main. Je n’ai jamais vraiment compris pourquoi il n’y avait jamais de feuilles blanches. Le fait est, que de toute façon, quelles soient vertes, bleues ou blanches, les feuilles sont rares. Tous les jours, on voit des journalistes en chercher pour pouvoir écrire. Une perte de temps, mais qu’importe, le temps n’a pas vraiment d’importance ici.

Des conditions de travail pas faciles d’autant plus qu’il fait chaud, très chaud. Alors chaque pas, chaque geste est un effort. Tout se fait selon un rythme lent et tranquille, tout du moins à cette période de l’année. Pendant la pause déjeuner, assis au maquis du coin, baptisé officieusement la RTB3, on se plaint mutuellement de la chaleur. Un collègue s’exclame : « Pourquoi ce sont les blancs qui ont inventé le climatiseur alors que chez eux, ils n’y en a pas besoin ? » La climatisation, c’est bien l’une des seules choses qui fonctionne en salle de rédaction. Il y a aussi une cafetière usée par le temps qui reste par terre et à laquelle personne ne touche. Le réfrigérateur, lui est bien souvent vide. Normalement, il devrait contenir des sachets d’eau fraîche pour les journalistes qui partent sur le terrain ou ceux qui travaillent en salle de rédaction. De toute façon, on ne sait pas bien pourquoi mais il ne marche plus.

La nuit tombe. Il est 18h30. C’est l’heure qu’a choisi la SONABEL, la Société nationale d’électricité du Burkina, pour effectuer son délestage dans le secteur 8 de Bobo Dioulasso, là où se situe la RTB2. Il n’y a plus d’électricité, pas de groupe électrogène non plus. Le journal ne sera pas assuré aujourd’hui. Le directeur, la présentatrice, le réalisateur et les techniciens se réunissent dans la cour. Ils attendent que le courant revienne pour assurer la rediffusion de 22 heures. En vain.

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.