Anissa Rami, journaliste pour Booska P et Héléna Berkaoui, rédactrice en chef du Bondy Blog, ont évoqué les différences de traitement dans les rédactions en tant que journalistes racisées, à l’occasion de la 18e édition des Assises de Journalisme de Tours. L’opportunité pour elles de réveiller les consciences sur ce sujet.
Les discriminations raciales sont omniprésentes dans les rédactions françaises. Un constat que déplore Anissa Rami, journaliste pour Booska P et membre de l’Association des Journalistes Antiracistes et Racisé.e.s, des faits appuyés par une enquête du SNJ-CGT. Créée en mars 2023, l’association met en avant la diversité raciale et les questions urbaines. Composée de 200 membres, elle souhaite améliorer les conditions de travail des personnes racisées, analyser les traitements médiatiques et dénoncer les biais racistes dans certains médias généralistes et traditionnels. Une lutte encouragée par la jeune journaliste : « Les quartiers populaires, les violences policières sont au cœur de notre travail, mais aussi l’islamophobie, le racisme anti-asiatique, les questions autour du conflit Israélo-Palestinien…».
L’absence de mixité dans les rédactions des médias généralistes
Formée au Bondy Blog, Anissa Rami n’a pas expérimenté de contraintes particulières concernant ses choix journalistiques. Au début de sa carrière, elle s’épanouit dans une rédaction en accord avec ses valeurs : « Le fait de commencer au Bondy Blog m’a permis de voir le côté « sympa » du journalisme en écrivant sur des sujets liés aux quartiers populaires et aux discriminations ». Lorsqu’elle a évolué professionnellement, dans des médias plus généralistes, elle s’est sentie limitée dans ses idées, de par le fait qu’elle soit racisée : « Le fait de toi-même te sentir minoritaire, ça fait que tu as moins confiance en tes sujets et en toi ». Par exemple, d’après elle, le traitement des quartiers populaires est forcément biaisé en raison de la faible mixité dans les rédactions : « Les journalistes ne sont pas neutres, évidemment, et parlent à travers leurs conditions sociales, leur existence et leurs expériences ».
« Les rédactions doivent être représentatives de la société »
Héléna Berkaoui, rédactrice en chef du Bondy Blog, dirige une rédaction accueillant des journalistes provenant de tout milieux sociaux. Un aspect qui, selon elle, manque dans d’autres médias : « Un rédacteur en chef de Libération avait fait le constat qu’aucun des journalistes ne venait de l’autre côté du périph ». Pour la rédactrice en chef du média associatif, certains journaux produisent des erreurs, pas considérées comme malveillantes, mais qui desservent la cause. Les profils sociaux sont souvent les mêmes, il est important de diversifier les points de vue pour obtenir une vision plus juste sur tous les sujets : « Les rédactions doivent être représentatives de la société ».
Lina Moreau, Sterenn Tiberghien
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