Les photographes Fanny Vandecandelaere, Amandine Micaud et Christian Clauwers, bien que venant de différents horizons, anglent tous leur travail sur le changement climatique. Ils font de la photographie un moyen de sensibiliser le public à la lutte écologiste. Ces intentions à la mode dans le milieu oscillent entre bonne conscience écologique et greenwashing visuel.
Capturer la beauté éphémère des glaciers : c’est ce que donne à voir Fanny Vandecandelaere dans son exposition « Sentinelles » au Théâtre du Point du Jour à Lyon. Amandine Micaud, photographe animalière et Christian Clauwers, explorateur et ambassadeur du pacte climatique européen, contribuent à la prise de conscience écologiste en mêlant, comme elle, photographie et nature.
« Un marqueur visuel du réchauffement climatique »
L’exposition « Sentinelles » de Fanny Vandecandelaere est à découvrir du 5 novembre au 20 décembre 2024. Elle s’inscrit dans la continuité de l’opéra « Le sang du glacier » organisé à la même période par l’Opéra de Lyon. Une démarche qui vise à aborder le dérèglement climatique à travers l’eau contaminée et la fonte des glaces. « Sentinelles » évoque pour elle « l’inaccessible et une mémoire à préserver ». Avec ses clichés, l’artiste souhaite montrer des glaciers en sursis, en survie et à protéger.
À l’entrée du théâtre, une pièce remplie de cadres sur les murs. Au centre, des tables et des chaises pour contempler, aussi longtemps qu’on le souhaite, les glaciers qui nous entourent. Prises entre 2020 et 2023 dans les Alpes, les photographies font voyager jusqu’à la roche, l’eau, la glace et le froid. Les panoramas allient glaciers, lacs, crevasses et vallées. Munie de son objectif et de son matériel alpin, Fanny Vandecandelaere fait face à ces montagnes pour nous transmettre son amour pour elles. Présentées comme majestueuses, elles sont un véritable « marqueur visuel du réchauffement climatique. »
Une tendance pour les sauver
Selon les chiffres du CNRS de 2021, depuis 2000, les glaciers en France perdent 267 milliards de tonnes de glace en moyenne par an et la fonte s’accélère. Face à ces changements de paysage, de plus en plus de photographes s’intéressent donc à l’environnement et à sa dégradation. En 2014, c’est devant le Glacier du Tour, dans le massif du Mont-Blanc, que Fanny Vandecandelaere développe une réelle conscience écologique. Son travail « interroge notre place face à cette beauté menacée nous invitant à prendre conscience de la fragilité de notre environnement » explique-t-elle. La photographe précise qu’à l’avenir elle aimerait développer des projets interdisciplinaires plus engagés avec des scientifiques.
Amandine Micaud, photographe animalière, est elle aussi très proche de la cause environnementale. Dans son domaine, elle se préoccupe de la fragilité des espèces et de leurs habitats. « La nature c’est toute la biodiversité, que ce soient les animaux ou les plantes. On la détruit tellement et ça me touche personnellement » confie-t-elle. Pour ces deux artistes, la photographie de nature n’est pas une tendance éphémère à prendre à la légère, c’est une volonté de participer à une lutte bien plus grande que leur passion. Leur intention est de toucher un large public, tout le monde pouvant devenir un acteur positif du changement climatique.
Un phénomène de mode
Avec le développement de cette pratique, la question d’un greenwashing visuel se pose. Les clichés pourraient être utilisés comme des outils de communication sans réelle volonté de faire évoluer les consciences et de mettre en place de véritables actions. Ces intentions sont étudiées dans de plus en plus de travaux scientifiques, tels que l’article Vers une esthétique environnementale : le tournant pragmatiste de Nathalie Blanc et Jacques Lolive de la revue Natures Sciences Société. Ils y présentent une tendance à utiliser, de manière superficielle et commerciale, la nature dans les arts.
Ce même phénomène est dénoncé par Christian Clawers, photographe depuis 10 ans et ambassadeur du pacte climatique européen. Avec son appareil photo, il parcourt le monde et documente les effets de l’humain sur la nature. Il questionne les motivations des photographes de nature : « Au début, je pensais être le seul à faire ça et maintenant beaucoup de personnes me copient. C’est peut-être une conséquence d’un phénomène de mode. » confie Christian Clawers. À l’inverse, ce photographe de longue date ne perd pas espoir « il est très tard, mais on peut toujours s’adapter et faire notre possible. »
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