La jeune humoriste lyonnaise de 23 ans, Morgane Berling, ne peut se séparer de son co-scénariste, Étienne Gachet, 46 ans. Il ne s’agit pas d’un père et de sa fille, mais bien d’un duo comique inséparable. Une amitié atypique, mais qui contribue à son succès sur scène.
À la terrasse d’un pub emblématique du quartier de la Croix Rousse à Lyon, une jeune femme aux boucles d’or boit son café. À sa droite, un homme plus âgé au style rock enchaîne les cigarettes. La carrière de Morgane Berling, humoriste et comédienne de 23 ans, débute lorsqu’elle fait lire ses écrits à un bon ami de son père. Étienne Gachet, 46 ans, se prête au jeu. Lui, écrivait des chansons tristes avant cette rencontre. Il lit, se moque, mais se sent inspiré. Il voit le potentiel de la jeune lyonnaise et devient son co-scénariste.
Le croisement de deux humours complémentaires
C’est aussi la rencontre de deux générations et styles humoristiques différents. L’une a grandi avec les blagues de Kev Adams, du stand-up parlé à la première personne. L’autre avec les sketchs de Murielle Robin, de l’humour théâtralisé. Ils échangent par mail, se font découvrir mutuellement leurs références et se lancent dans l’écriture. Des sessions de travail qui n’ont pas toujours été fructueuses selon la comique : « on était juste sur une terrasse à boire des sirops et fumer des clopes en se racontant des anecdotes de nos vies. Je partais au bout de trois ou quatre heures, on n’avait pas écrit une vanne en plus ».
Pourtant, ces moments ont été essentiels pour construire ce duo, tous deux originaires de la Croix Rousse. La jeune femme le souligne : « tu imagines, tu commences à écrire avec quelqu’un, tu te rends compte que vous avez pas du tout les mêmes valeurs, les mêmes choses à défendre ». Ils ont dû apprendre à se connaître et à travailler ensemble.
La vingtaine : un spectacle qui parle à tout le monde
Une thématique est donc ressortie de ces instants de vie : le passage à la vingtaine. Une période à laquelle tout le monde se confronte. Pour la jeune humoriste, « l’idée n’était pas de dire ce que je vis est plus dur que ce que vous vivez vous, mais plutôt de dire, je ne sais pas comment je me place vis-à-vis des autres et de moi ». Trop vieille pour être une enfant, mais trop jeune pour être une adulte. Un sujet où les deux auteurs se retrouvent.
Au cœur du spectacle, on distingue les inspirations des deux artistes. On retrouve certains passages de stand-up où la comédienne caricature des moments de sa jeune vie en interagissant avec le public, mais aussi l’apparition de personnages bien pensés, inspirés par l’ancienne génération d’humoristes. Ce croisement générationnel en fait la force de leur collaboration et le public le ressent. Pour la comique lyonnaise, les meilleures représentations du spectacle sont celles où le public est très large, où tous les âges sont présents : « on voit bien que ça ne rigole pas aux mêmes moments, mais ça se complète. En termes de ressenti sur scène, ce sont les meilleurs ».
Le duo ne s’arrête pas là. Ils vont au-delà de l’humour, Étienne explique : « il y a certes du rire, mais un fond sérieux sur les interrogations. Il y a quand même de l’émotion ». Morgane Berling utilise ce spectacle pour poser tous ses questionnements, elle qui a souvent été méprisée par les personnes plus âgées qu’elle. « Il y a toujours quelqu’un pour te rabaisser peu importe l’âge que tu as. On est toujours le plus jeune de quelqu’un. », lance le scénariste, après avoir allumé une énième cigarette. Pourtant, au fur et à mesure de la conversation, on comprend très vite qu’Étienne se veut être protecteur avec Morgane, lui qui met parfois sa vie personnelle de côté pour la carrière de l’humoriste. Cette relation si particulière fait parler : « les deux premières questions arrivent rapidement : c’est ton mec ? C’est ton père ? », s’en amuse l’auteur. La jeune femme sait qu’elle peut compter sur son coéquipier sur scène comme en dehors.
« Quand tu rencontres quelqu’un avec qui tu peux être à vif comme ça, c’est suffisamment précieux pour le garder »
Un soutien dont elle ne pourrait se passer pour ses activités professionnelles. Lors des premières représentations, Étienne endosse le rôle de manager. Une tâche peu plaisante pour celui qui co-écrit le spectacle : « j’ai dû envoyer 3 000 mails pour 35 dates, c’est du boulot, c’est très ingrat, mais il faut le faire ». Dans l’écriture, il s’épanouit davantage. À deux, ils écrivent plus de 300 pages de brouillon pour une heure de divertissement. Tout ce travail leur fait passer énormément de temps ensemble. Chacun met un pied dans la famille de l’autre. Les deux ne sont plus de simples collègues, mais de véritables amis. « Quand tu rencontres quelqu’un avec qui tu peux être à vif comme ça, c’est suffisamment précieux pour le garder. », conclut Morgane.
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